Les cheveux blancs, l’air parfois vieilli
Il prenait un grand sac pour le remplir
De choses et d’autres, afin de se nourrir
94 ans, il partait, allait et marchait ainsi
Bien sûr, dans son coin, il regardait la TV
Par solitude peut-être, sûrement par isolement
Accueillant toujours les visiteurs avec allant
Pour parler, pour écouter, pour échanger
Une vie bien chargée, côtoyant la mort
A la guerre, sur les fronts, sous les balles
Revenant chaque fois sans pleur et sans râle
Vers sa femme, très anxieuse de son sort
Un jour, l’hiver répandit partout le gel
Sous ses pieds, ne le soutenant pas
Il glissa hors de la vie, en un dernier pas
C’était mon père, patriarche éternel.
Heureusement qu’il n’y a qu’un Diois
Peut-être le pouce ou bien le majeur
Il est difficile de faire le choix.
Le pouce est le doigt du voyageur
Choisit celui-ci dit mon petit doigt
Je suis sourd et je ne vois rien
je suis aveugle et je n’entends rien
De mes mains, je ne pense à rien
De ma tête, je ne fais rien
Je suis bon et mauvais à rien
Je n’ai rien, car je ne risque rien
J'ai tout car je ne demande rien.
Je dis plus en ne disant rien
Davantage en disant moins que rien
Je ne crains rien, je n’espère rien
Je ne sais rien, je ne doute de rien
Tout ou rien, je prend rien
Tout est dans rien
Je ne comprends rien.
Il ne se passe jamais rien
Rien de rien
Les vignes de Châtillon en Diois
Sur le coteau, s’étendent autour de moi.
Destinées à la vinification :
De l’égrappage à la fermentation
Ce bon vin dans les grappes de raisin
En devenir, me rend déjà zinzin.
Mais, il faut boire avec modération
Hips, pressurage et hips, macération...
Dans les tréfonds d’une forêt épaisse du Haut-Diois,
Au bout d’un morne chemin qui semble aller nulle part,
Se dresse fièrement une allègre cabane en bois
D’où s’élève une fumée épaisse, ardente et noire.
Un vieillard, habillé de frugales nippes usées,
Agrémenté d’une broussailleuse chevelure blanche
Est assis sur une souche ambrée, le dos voûté.
Sur ses mains noueuses son visage serein se penche.
Il pense, rêve, imagine et médite longuement.
Immobile, fière et noble, telle une statue de pierre,
Il murmure parfois comme un vieil arbre frémissant
Au vent suave qui l’accompagne dans ses prières.
Il a fui le monde des humains et des machines
A rejoint celui des arbres, des fées et des bêtes.
Il vit de peu, de pain, d’eau, ne crie pas famine,
Cultivant son jardin avec la grâce d’un poète.
A ses cotés, allongé dans l’herbe grasse, son chien,
Qui parfois à la pleine lune, hurlent avec les loups,
Son ami dévoué, son précieux unique bien.
A l’écoute patiente et assidue de mots doux.
Il ne hausse jamais la voix, parle avec les yeux
Et les mains, aux arbres, fleurs, oiseaux, abeilles
Aux animaux qui peuplent la forêt et aux dieux
Faisant corps avec le silence, la terre, le ciel.
Une source claire se languit dans le creux d’un rocher,
S’écoulant au pied de sa masure, un bien-être
Stable pour cet ermite, volontaire et isolé
Dans la nature, où jamais il ne cesse de naître.
Tout le monde se tut
A l'ombre d'un doute
Elle, là bas, émue
S'élança de la route
Bondit dans l'azur
Avec la grâce
D'un doux murmure,
Tel un ange qui passe
Sur les champs de lavandes,
Dans les chants des cigales
Dansant la sarabande.
Tout le monde s'esclaffa
De cette pirouette royale
Ravi que pour elle tout va.
Elle a dit : joyeux Noël,
Et lui, il eut un sourire,
Il avait vécu le pire.
Car, le temps était au gel,
La neige était tombée
En flocons désordonnés.
Et maintenant devant elle,
Sous un grand toit solide.
Ses pieds au sec, avide
D'un bonheur non virtuel.
Dehors, au froid, il était.
Maintenant, il souriait
A ce Noël, maternel.
Ce beau visage accueillant,
Entre bœuf et âne, tendrement.
Je respire...sous les tuiles opalines .
Un pas
Rapace dans le ciel
Ciel dans la passe. Indicible – Ne bronches pas
Mur de faïences – Tu danses légères. Tu voles.
Deux pas
J’expire, non pas. Les mots des maux jonglent disparates.
Les mille feuilles s’envolent à mon regard gourmand.
Extase. Rase-motte, tu voltiges sur le prés proche jusqu’au porche près.
Trois pas.
Passo doble en pirouette. Un, deux, trois
J’inspire, oui, j’ins-mieux. Rien qui bouge sauf le silence immense.
Suspendue entre ciel et terre. Immobile comme un point de suspension.
Quatre pas.
Qui es tu ? Aérienne. Je me suis tue. Volière d’argent au soleil d’or.
Oiselle au goût de miel. Je suis vaincu. Arrachecoeur dans une oubliette, noire comme un trou noir.
Suis ici bas, toi la haut, tu signes des mains-ailes et tu t’empares de l’espace ; Il me reste le temps...long.
Cinq pas
Attente. Faim sans fin. Tentatrice tentaculaire. Tes yeux sont des aimants quantiques.
Je cède sous tes pas comme un pont frêle. Pontife et définitif. Tu n’es qu’un point infini.
La rue se cambre sous un puissant lumbago. Je m’efface. Face à terre, terrifié.
Six pas
En mouvement, limpide comme le verre. Transparence des pensées. Je rêve et je m’évanouis
sur le pavé où grouille un vers de terre. Je vois ton ombre ambrée lovée qui ose un clignement.
Debout, je souffle sur un pied de biche dansante. Au ras des fleurs en cœur. Hirondelle, tu es, immortelle.
Sept pas
Un, deux, trois, etc...sept coups d’une horloge fantôme aux aiguilles létales. Sonne la mort sous sa capuche. Ange, je te cherche dans l’évanescence de mes souvenirs. A venir. Peut-être...Ou peut ne pas être. Couchée dans le nuage, tu t’y noies et je te vois
Huit pas
Passe ,paire et gagne. Tu es lointainement proche. Tu te caches derrière le vent. Pare vent. Je te devines dans les méandres de l’air coquin derrière tes deux monocles. Je sens ta main qui divague, mine de tout. Je reste et peste.
Neuf pas
Pour toujours. L’amour est vaporeux et se liquéfie dans mon cœur. Nous dansons une ronde et tourne, tourne manège. Nous deux. Valsons avec l’Univers sans piétiner le ver de terre. Aimons sans filet d’huile dans le pot au feu de nos âmes. Fusion thermonucluaire.
Dix pas
je dis pas rais..mi fa sol la si do..dans tes yeux.
Le silence est une caresse exquise, lente et fragile
Qui jamais ne s’épuise comme une eau de vie
S’écoulant sans tourment, fluide, légère et agile
Que l’on déguste sereinement avec euphorie.
Le silence mène au paradis. Il est d’or
C’est un rêve qui s’éternise sans rumeur
Dans un monde où tout semble mort.
Sauf le murmure ardent de nos cœurs
Le silence mène en enfer, esseulé, solitaire.
On n’en sort pas, car ailleurs c’est pire ;
Bruit, cacophonie, cris, hurlements, colère.
Mieux vaut y rester. Juste ajouter le rire.
Le silence est dans l’âme qui n’a pas d’oreille
Mais des yeux pour voir la beauté du monde.
Entrer en soi et sombrer dans l’apparent sommeil
Du juste, pour éclore sa fleur d’amour féconde.
Le silence qui vient est à prendre ou à laisser.
L’ange passe, goguenard. S’en retourne, s’en va
Sourire ou s’agacer. Gare il peut bien s’en lasser.
Le vénérer ou le rompre. Croire en l’ange ou...pas
Tu cries, tu vocifères, tu pleures!
C’est ainsi que t’échappe le bonheur.
Tu te sentirais moins coupable
Si ta parole était juste et impeccable.
Que tu sois jeune ou vieux,
Faut il tout prendre au sérieux ?
Des affaires qui vont et viennent
Il ne faudrait pas en faire tiennes.
Surtout, ne fais pas de supposition.
Tout peut arriver en maintes versions.
Te pourrir la vie pour un futur incertain.
Sois présent, n’imagines pas le lendemain.
Ah si tu avais su ou non, peut-être
Pour les choses, et pour les êtres,
Aurais tu fais ou agis davantage ?
Faire de son mieux est de bon usage
Ne sois pas crédule, reste sceptique!
De tout ce qui est dit, soit critique!
Parfois la parole est bonne et vraie.
Apprend à écouter avec grand respect.
Chaos l’avait bien dit :
Les choses se délitent.
Les êtres s’envient.
Tout va trop vite.
Cronos l’avait prédit :
Les choses s’effacent.
Les êtres s’enfuient.
Tout passe.
Éros l’avait promis :
Les chose s’attirent
Les êtres se lient
Tout est désir.
Thanatos l’avait médit :
Les choses se meurent.
Les êtres s’oublient.
Tout est leurre.
L’énergie émise par un atome est quantifiée.
Elle n’est pas continue mais échelonnée.
Elle ne prend pas toutes les possibles valeurs.
Certaines lui sont interdites, elle en a horreur.
Dualité onde particules sont deux facettes
D’un même phénomène. Une ardeur secrète
Révèle la particule en onde ou en grain de matière,
A son grès ou avantage. Ainsi se conduit la lumière.
Deux grandeurs conjuguées sont impossibles
A mesurer avec précision. Incompréhensible,
Semble t’il. C’est le principe d’indétermination
Qu’il faut admettre quels que soient nos opinions.
Le principe de superposition quantique,
A été bien longtemps nié par les sceptiques.
Tel le chat de Schrödinger qui est à la fois mort
Et vivant. De quoi perdre à jamais le Nord.
L’observation influe sur le système observé.
Davantage compréhensible, ceci est prouvé.
Ni la finesse et ni l’agilité des instruments
Ne pourront jamais mesurer plus précisément.
Plusieurs particules forment un système lié
Présentant des états quantiques et propriétés
En corrélation, qu’elles soient distantes ou non.
Un tel état est dit enchevêtré ou en intrication.
Des événements qui auraient pu se produire
Mais qui ne se sont pas produits, sans mentir,
Et sans rire, Influent les résultats de l’expérience
Ainsi, La contrafactualité heurte notre intelligence.
Il est une femme merveilleuse
Pour ses enfants, travailleuse
Avec grande tendresse et écoute
Sans jamais sombrer dans le doute.
Une vie d’abnégation et de devoir,
Cinq bambins non pas sans histoire
Toujours a faire le mieux pour eux
Son bonheur est de les rendre heureux
Les nuits courtes, portant son amour
S’épuisant à la tâche de jour en jour.
Une vie de mère, pleinement femme
Dans son corps s’éteignit la flamme.
Le crabe vint la ronger doucement
A l’endroit où elle donna naissance,
De ses enfants, avec toute son affection,
Sa tendresse, son amour et sa passion.
Elle lutta contre le cancer tenace,
Pleurant de fièvre et d’angoisse,
Se ratatinant sous la vive douleur,
Comme sans eau, se flétrit une fleur.
Elle est ma sainte mère, ma chère maman,
Elle ne méritait pas cet ensorcellement.
Maintenant, bien heureuse auprès des siens,
Dans un monde qui n’est pas encore le mien.
Ne devrait on pas avoir plus de gratitude
Pour les femmes, souvent dans la servitude?
Méritantes, aimantes, souriantes, patientes,
Telle ma mère, désormais mémoire flottante.
Il faut aimer chaque jour et chaque nuit.
L’amour coule d’une source jamais tarie
Celle d’une mère, cajolant son petit bébé,
Fragile chaire, âme pure et nimbée.
Il était là dans le froid blanc et intense
Emmitouflé dans une parka souillé trop large
Un petit homme, habitant sous les cieux immenses
Blessé, le sourire constant, vivant à la marge.
Sans domicile chaud, en attente du réconfort
De la maraude toujours trop tardive, espéré
Comme un animal, bien insouciant de son sort
Noyé dans son désert, saisissant cette bouée
La soupe chaude avalée avec empressement
Provoqua l’éclat de rire, comprimé en lui
Pendant les longues heures d’angoisse et d’isolement.
Sans maison, sans travail, sans argent, sans ami
Dans l’errance, oublié, écarté de l’abondance
Ruine de l’âme, malgré tout il riait à la Vie.
Un scélérat sautillant dans la boue en riant
Reçu subitement le saint Esprit en se cognant
Contre le bâton d’un gendarme en uniforme.
Alors, il devint un gentilhomme en haut de forme.
Sa coquette qui n’en revenait pas, partit à petits pas,
Consternée, vers d’autres lieux et d’autres forts bras,
Emportant le magot du ménage afin de bien vivre,
De bien manger, de bien boire à en être bien ivre.
Notre homme avait belle allure, chaussures cirées,
Pantalon et veste en lin, mais il en avait soupé,
De vivre seul, d’être triste le jour comme la nuit,
Décida de redevenir coquin afin de chasser l’ennui.
C’est alors que la maréchaussée eut pour exigence
De le séquestrer afin qu’il soit juger dans l’urgence.
Il courut tant qu’il tomba à genoux au pied d’une dame.
Émue, elle vit en lui son chevalier dévoué corps et âme.
Ils s’aimèrent, eurent quelques filles et une flopée de garçons
Dont certains devinrent gendarmes, d’autres grands fripons.
Quant à lui, redevenu gentilhomme, vieillissant et bien sage,
Vécut honnêtement, rêvant d’être à nouveau libre et sauvage.
Trois petits vauriens mutins courraient
A saute-mouton sur les hautes haies.
Ils fuyaient le méchant loup pompette
De vin mauvais. Il n’était pas poète.
Le bourgeois derrière son monocle
Pleurait de chagrin comme Sophocle
Désespéré, au suicide d’Antigone.
Comme personne, il aimait la baronne.
Le loup dévora la baronne de bonne grâce,
Puis le bourgeois, malgré lui. Il était vorace
Les trois vauriens avaient franchi l’horizon,
Hors d’atteinte, riaient comme des polissons
Le printemps , nous chausserons nos lunettes de vue
Et nous irons à cheval sur nos principes dans les rues
Afin de distiller l’eau de vie depuis un alambic en or
Et la boire jusqu’à plus soif pour que le mauvais sort
Ne nous tue plus au feu légendaire d’un enfer sidéral.
L’été nous serons sous le soleil d’un amour viscéral.
Et nous irons à pieds à travers les champs des fières âmes,
En vers et contre tout afin que nos cœurs s’enflamment.
L’automne, nous mourons un peu, étendu dans la liasse
De feuilles sauvages, en attendant qu’un bel ange passe.
L’hiver, nous fermerons rideaux et paupières, puis dormir
Les sens éveillés, à l’affût, tel un chat futé, d’un sourire
Pourquoi faut-il se dire pourquoi ?
Dans cet air maussade sans émoi
Errer sans savoir que la vie s’étend
Au delà de la loi, de la foi et du temps
Te souviens tu lorsque nos mains se sont déliées,
Un matin de triste brume, où pleurs et pluie mêlés,
Dans la fragile confusion d’un monde amolli,
Le bonheur évanoui, nos cœurs alanguis.
Mes vieux démons se blottirent sous un piètre abri,
Les yeux clos, dans le silence épais de l’oubli.
La grâce avait ensemencé les graines de joie,
Pour qu’éclosent les fleurs d’amour aux pétales de soie.
Pleine de grâce, tu glisses dans le temps et tu ondoies
Corps et âme, à la lumière d’un ciel qui flamboie.
Les nuits se firent jours pour montrer ta vénusté.
Mes yeux se firent feu pour attiser ta beauté.
Si tous les soiffards et les traînards
Se donnent amicalement la main,
Et s’unissent en une danse des canards,
Enchantés seraient les lendemains.
Se la couler douce dans un sauna,
Boire un un petit coup et rêvasser,
Aveuglé par l’éclat d’une nova
Ou d’une diva aux yeux aimantés.
Tituber comme un leste chaland libre,
Une fleur sauvage, ivre de feu et d’eau,
Un lascif nuage de laines de cuivre,
Un chant, baigné de babils d’oiseaux.
Un jour viendra où les doux rêveurs,
Les oisifs, les tardifs, les flemmards,
Les distraits, les cancres, les semeurs
D’amour, seront enfin les veinards.
Parfois, la lune sourit aux couche-tard,
Un verre dans le nez. L’aura de l’ange
Sur le crâne, soûlé d’écumes d’un marc
Le barde comme un nourrisson, de langes.
Si la femme est l’avenir de l’homme
La flegme est l’avenir du soiffard.
Qu’on se le dise, de Venise à Rome,
A voix douce, sans brusquer les traînards
Tu es sorti de prison,
Toi le vagabond sans nom,
Gracié par le Président.
Il avait reçu à temps
La grâce pour te la rendre,
Juste avant de te pendre,
Inculpé d’un atroce délit
Que tu n’as pas commis.
Au mauvais moment,
Tu prenais du bon temps.
Au mauvais endroit
Tu t‘es cru un oisif roi,
Au soleil blanc de l’été
Sur la plage ensablé.
Accusé à cri et à tord
Du crime sur le port.
Te voilà libre de vivre
Comme un oiseau ivre
De légèreté et de grâce,
Qui de ses ailes embrassent
Le grand air et les nuages.
Libre de poursuivre ton voyage.
Les trottoirs sont livrés à l’ivresse des êtres perdus
Leurs traits voilé de nuit jusqu’au petit matin.
Des cloches tintent au loin dans la blanche brume épandue
Saluant l’aurore et le coucher des mâtins.
Un homme boite, courbé sous le poids d’un grand chagrin,
Le regard éteint, louvoie dans l’ombre de la nuit.
Il tente d’effacer ce mal en buvant du vin,
Chante, pleure, crie, gémit afin de chasser l’ennui.
Il s’affale sur un banc public sous un grand chêne,
Noble arbre aux ramures denses, habitée de milles bêtes,
Oiseaux, écureuils, insectes, sommeillant sans peine,
Et sans douleur, tandis que l’homme se prend la tête.
Ses pensées divaguent, la tête pesante entre ses mains.
Le sort l’a touché en plein cœur. Il veut mourir.
Couler comme une pierre dans une mer sans lendemain.
Quitter ce monde qui le broie, qui le fait souffrir.
L’arbre lui parle à l’oreille. Les oiseaux se réveillent.
L’écureuil pointe sa truffe, sourit à l’astre du jour
Une douceur plane mettant toutes les feuilles en éveil.
Une pluie de grâce caresse l’espace avec amour.
L’homme se lève, déambule vers l’horizon heureux.
Il est léger comme un ange porté par ses ailes,
Est ce son âme ou son corps qui brille de milles feux
Ou le bonheur retrouvé sous un favorable ciel ?
Bonjour dit la petite pierre au gros caillou.
Je voudrais t’embrasser, te déposer un bisou
Mais ne peux bouger. Dieu nous a fait inerte.
Le caillou répond : je viendrai telle une chenillette
Poussé par la pluie de l’orage à venir, qui sera fort.
Tout est sec, la pluie ne viendra pas sans effort,
Se désole la pierre, nous sommes tous maudits,
Ce n'est pas ainsi que je voudrais que soit la vie
Voilà des longs siècles que je ne me suis pas mue.
Il y a longtemps que le caillou n’a pas été aussi émue.
Tout arrive, murmure t-il dans ce monde incertain
Il suffirait d’imaginer que je te prend la main
Pour que cela se réalise. Ah la méthode Coué,
Je l’applique les jours, les nuits depuis des années,
Je n’ai toujours pas de main, réplique la pierre.
As tu du cœur, susurre le caillou qui désespère ?
On dit que j’ai un cœur de pierre, ce n’est pas vrai,
Ce n’est pas vrai! Les gens sont très méchants,
Mon cœur est durable. Il bat depuis la nuit des temps.
Oui, je l’entends, s’extasie le caillou, tonnerre de dieu
C’est l’orage qui approche. Appelons de tous nos vœux
Que les lois de Newton et le théorème de Pythagore
S’appliquent, afin que se touchent nos deux corps.
A cette distance, pense la pierre, la relativité générale
Est inopérante. D’après mes calculs, tu es sur le chemin royal
Pour venir jusqu’à moi, lorsque les flots te soulèveront.
Espérons, suggère le caillou, que Spinoza a raison
Et que de cause à cause, je serai emporté par la flottaison
Qu’Archimède ne me fait pas couler et finir dans la boue.
Dieu est Nature, dit Spinoza. N’en faisons pas partie ?
Oui, se réjouit la pierre, nous dépendons de notre appétit,
Notre désir qui rejoint la nécessité de nous trouver ensemble.
L’eau monte, crie le caillou. Je me sens léger et j’en tremble.
Viens, dit la pierre, l’amour de ma vie, viens contre moi,
Puis restons liés pour l’éternité. Oh oui, tout contre toi,
S’émeut le caillou. Je te sens, tu as la peau si douce,
Que je me sens bien, ta peau est faite d’une tendre mousse.
Elle m’habille, dit la pierre, et me protège du froid.
Tu es granit ou calcaire, questionne le caillou en joie ?
Pierre ponce comme Pilate. Je suis passé par le feu
Des volcans. Nous voici unis pour l’éternité, nous deux !
Pour rester collés, tu me donneras un peu de ta mousse,
Elle me chatouille, est ce le frisson de l’amour qui pousse ?
La force d’attraction des corps est inversement proportionnelle
A la distance entre les deux corps. Elle est fusionnelle,
Désormais infinie. Deux aimants magnétiques qui s’aiment,
Comme deux amants magnifiques . Tout un magique poème !
Es tu bien installé, dit la pierre pour assister au coucher du soleil ?
Comme un pacha, je jouis de plaisir car m’est donné tout le ciel.
Je ne suis pas difficile. Je médite comme un sage ermite
Je refais le monde en pensées, j’ai besoin d’infini sans limite.
Silence, mon cher, j’entends l’orage tonner qui s’approche
Est anxieuse, la pierre ! C’est un sale temps, tu t’accroches,
Je ne veux pas te perdre. Ne t’inquiètes pas, la mousse
M’enrobe. L’amour est un bon engrais pour qu’elle pousse.
La mer, au crépuscule engloutit le soleil.
Elles est peinte en mauve, zébrée de reflets de miel,
Gardant l’histoire de la Terre en son profond sein.
Le vent chante son odyssée en alexandrin.
Dans le village lointain, les cloches sonnent l’angélus.
L’église et les bars sont pleins comme des autobus.
On prie en silence. On ricane toujours plus fort,
Le verre à la main, le mauvais vin dans le corps.
Le diable se promène dans les rues en redingote,
A l’affut d’un piètre coup pour railler les bigotes.
Il fait froid. L’hiver ne ment pas. La nuit survient.
L’odeur du mal couvre les rues nues. Seuls trainent les chiens.
Sur la place, un vieil homme git, geint et cuve son vin.
Une fenêtre est éclairée comme un œil divin.
Apparait nimbée une femme, telle un feu follet
Dansant la farandole, être de lumière ailée.
Le vieux se dresse chancelant, écarquille les yeux.
L’alcool fait des miracles, croit-il. Prodigue des cieux.
La femme lévite jusqu’à lui. Sa robe flotte au vent.
Un large sourire embrase son jeune visage aimant.
Papi, tu vas prendre froid, viens, rentre à la maison.
Mammi attend. Elle cuisine un plat de saison.
Le diable s’éloigne quinaud, bourdonnant des mots fous
L’heure du crime n’a pas sonné. Un coup du grand Tout !
Je change de métier, dit-il. Je deviens vieux et las.
Désormais inapte à sonner le fatal glas.
Non, le grand Tout ne peut pas tout, je veille au grain.
Des guerres foisonnent. Adviendra le jour du grand Rien.
Un chapeau s’éclipse en fumée,
Tandis que l’hiver rude meurt
Dans l’encens des fleurs parfumées.
Le ciel sourit d’un bleu charmeur.
Les flâneurs mènent leur bedaine
Sur les lents trottoirs de l’ennui,
Oublient jusqu’à leur nom et peine,
S’accrochent au jour vif qui s’enfuit.
Assis sur un banc crapoteux
Mes pensées divaguent fugaces,
Soucieux des âges souffreteux.
Je me vautre au soleil sagace.
Nous courrons par les rues et champs,
Sans pause, aveugle du temps futur,
Traînant nos rires éteints d’antan.
L’amour est là sous la fumure.
La leste fumée nous égare.
Espérer l’idée d’un sourire
Partir léger, quitter la gare,
Voyager, verdir et fleurir.
Loin ou proche, sortir du corps
Marauder comme un jeune lérot,
Quêtant des fruits, de ports en ports,
Voguer sur de frêles rafiots.
Ne plus languir les ans qui fuient
Les tours de vie qui se délitent,
Tonner de rire dans la nuit.
Flotter en ombre qui lévite.
Voyager à pied, à cheval,
En fiction ou bien à vélo.
En train, en rien ou en cavale
Dans l’illusoire ou en radeau.
Un chapeau s’éclipse en fumée
Tandis que le printemps éclot.
L’abondant soleil orangé
Rit de tous ses radieux rameaux.
Et vont les braises de mon esprit,
Chauffés à blanc dans le creuset
De ton cœur azur qui sourit
D’un délicat soupir osé.
La marée montante est mariée
Avec le vent qui souffle fort,
Emportant les cris du carrier
Guidant son bull avec effort.
Je flâne la main dans la main
D’une jolie chimère amoureuse,
Au soyeux parfum de jasmin.
Mirage dans mon âme heureuse.
L’amour est sous le sol fertile.
Un mot pour que naisse la fleur,
Malgré les rites mercantiles
Du monde faussaire des leurres.
Un mot, un son qui teinte et coule
Comme la source d’eau de vie
Je t’aime. Le Tout se déroule,
Se modifie et s’embellit.
Devant la maison du grand sage,
Me voilà ! Persiennes haussées.
Le balcon où dort le vieux mage,
Est jonché de belles pensées
Ce grand sage est fou car il aime.
Il vit avec les anges divins
Ce fou est sage car il aime.
Il vit avec les diables devins.
Le chant de verre est plein de vin
Et du sang de nos chers ancêtres.
Son refrain fend le ciel d’airain,
Unit dans l’amour les nobles êtres.
Un chapeau s’éclipse en fumée.
L’été bénit ses premiers bals.
Hommes, femmes dansant la bourrée,
Se serrant au coup de cymbale.
Les épis de blés qui tremblotent
Sont comme les plumes affutées
Des poètes errants qui sanglotent
De ne pas aimer tout l’été.
Un jour viendra l‘automne pâle,
Les arbres ensanglantés de feuilles,
Au seuil du triste hiver opale.
La nature froide fait son deuil.
L’année fait son tour de manège.
Saisir le pompon de l’amour.
Rien n’est hasard, tout est stratège.
Même la nuit peut devenir jour.
Me voilà près de l’être aimé.
Elle est toute contre le feu,
Vêtue de grâce, les yeux levés.
Son baiser est comme un vœu.
C’est ainsi que la vie s’épuise,
Se revigore dans l’ardeur.
Ce monde s’étouffe et se brise,
Sauf les amants voyageurs.
Un chapeau s’éclipse en fumée.
Un melon ou un bob de plage ?
Casque ou délicieuse pensée ?
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